Patrick Gruau Président du Groupe Gruau

Date:

Leader de la Carrosserie Construction, le groupe Gruau affiche une croissance forte à l’international, reposant sur une recherche et développement capable d’apporter tous types de solutions d’aménagement de véhicules en fonction des besoins de ses clients et encore davantage, des clients de ses clients.

Gruau apparaît comme le plus international dans le VUL en termes de carrosserie construction, et est présent en Algérie et au Maroc, par exemple, comment opérez-vous pour le développement dans ces pays ?

Le groupe Gruau est délibérément tourné vers l’international, qui se veut un levier de croissance important. Cela est rendu possible par notre capacité à nous adapter et à intégrer dans nos développements la réalité culturelle des pays dans lesquels nous travaillons. Par ailleurs, nous avons intégré toutes les solutions en carrosserie construction qui nous permettent de satisfaire les exigences de tous les clients. Si l’international est notre levier de croissance, c’est aussi parce que nous investissons bien en amont de la fabrication sur les nouvelles technologies.

Quelles sont les principales difficultés que vous rencontrez à l’international ?

Au-delà des spécificités en termes de taxes, de douanes, de législations au sens large que nous devons bien maîtriser, ce qui nous pose problème, ce sont les modifications brutales des conditions d’entrée dans les pays. Les frontières peuvent être fermées du jour au lendemain pour des raisons politiques, sécuritaires ou économiques. Nous pouvons travailler de différentes manières mais si, dans un pays, nous ne pouvons pas exercer notre métier, nos métiers devrais-je dire totalement, nous pouvons être confrontés à des diminutions drastiques de commandes, ce qui réduit les volumes globaux et donc notre capacité à être compétitifs. Un autre exemple illustre cette situation. Lorsqu’en Algérie, l’importation des véhicules neufs est contingentée ou supprimée, nous pouvons produire localement, mais les volumes insuffisants sur un secteur comme l’ambulance par exemple, nous empêcheront d’être compétitifs. Tout au moins, ce sera beaucoup plus difficile

Comment travaillez-vous en Algérie et au Maroc, essentiellement ?

3 500 ambulances circulent sur le territoire algérien, des ambulances qui ont été apprêtées, aménagées par nos soins et livrées directement en Algérie. En produits finis. Les nouvelles lois ne permettent plus cette approche mais nous sommes toujours présents par notre filiale, Gruau Algérie. Gruau a créé ce site industriel et de services, récemment, après avoir passé une vingtaine d’années à travailler sur le territoire national. Cette filiale a vu le jour avec l’aide d’un algérien, dont 50 % du parcours professionnel a été effectué en France. Cette double culture nous a été profitable, parce qu’elle nous a permis d’affiner notre offre en fonction des aspirations algériennes, de leur sensibilité. L’identité culturelle s’avère essentielle, et si l’on devait illustrer ce propos, je parlerais de poésie algérienne, de même que j’évoquerais la rigueur polonaise ! Au Maroc, nous travaillons différemment, en produits semi-finis, c’est-à-dire en livrant des kits en CKD auprès des carrossiers locaux afin qu’ils puissent les monter, grâce à une formation qu’ils ont suivie chez Gruau auparavant.

En clair, vous adaptez vos process de fabrication ou de distribution en fonction des impératifs nationaux ?

Nous avons coutume de dire que nous disposons de la boîte à outils la plus complète, ce qui nous permet de répondre à toutes les demandes, dont on peut énumérer quelques modes de fonctionnement, du « build up », c’est-à-dire de la production de kits à monter via des alliances commerciales avec des acteurs locaux, comme aux États-Unis, avec des réseaux de carrossiers. Autre modèle qui fonctionne bien, la co-entreprise, telle que celle formée avec Sortimo, le spécialiste allemand des systèmes de rangement métallique pour véhicules utilitaires, mais, souvent, il nous faut partir de zéro comme en Pologne en Espagne, ou aux USA. Il nous arrive également de racheter une société comme Onnicar en Italie, ce qui s’avère plus coûteux, mais nous fait gagner beaucoup de temps. Et n’oublions pas, le transfert de savoir-faire, technique que nous utilisons en Chine. Cette combinaison de possibles s’appuie, en outre, sur notre capacité à travailler 34 marques de véhicules, sous toutes ces formes, en transport de personnes comme en fourgon grand volume, et tous types de véhicules utilitaires.

Qu’est-ce qui fait la spécificité d’un tel métier, en dehors de la technologie ?

Notre métier reste un métier d’hommes, où l’homme est clé. Il est essentiel d’en tenir compte, cela part de la conception, de la compréhension des besoins d’un pays, des utilisations diverses des professionnels, des contraintes des pays, géographiques, météorologiques, économiques. On ne peut pas penser une production en France, il faut la penser dans le pays où on va vendre ces produits. En Algérie, nous travaillons les kits en fonction des études de notre partenaire et nous pouvons le faire parce que nous sommes des spécialistes, formés, et capables de faire du tout terrain. Comme je le disais, notre seul frein c’est de ne pas pouvoir amener des véhicules neufs. Or ils nous sont nécessaires pour qu’on puisse les aménager en Algérie ! Dans tous les cas de figure, il nous faut être sur place pour mesurer les évolutions en temps réelle, nous prenons le pouls plus rapidement et pouvons être plus réactifs. Au Maroc, nous avons produit 120 mini cars, que nous avons conçus en kits et testé le montage à blanc à Laval (siège du groupe Gruau, ndlr) avec les carrossiers marocains que nous avons fait venir en formation. Cela fonctionne très bien.

Gruau est connu pour ses innovations technologiques, comment être innovant en servant autant de pays et de besoins différents ?

En réalité, nous anticipons les besoins des clients, et nos clients sont aussi des constructeurs automobiles ! Il y a quelques années, nous sortions les véhicules électriques et étions capables de les habiller à la demande, aujourd’hui, ils sont connectés, donc nos services le sont aussi. La richesse de l’inventivité est telle que nous devons, effectivement, être sur tous les fronts, en même temps. A chaque métier est associé à un véhicule utilitaire et aujourd’hui, les véhicules doivent tous être connectés en fonction des métiers. Nous travaillons ainsi en réalité augmentée pour être en mesure d’adapter des solutions de connectivité. Quand on associe les multiples usages d’un métier à une connectivité bien pensée, nous apportons une plus-value importante au client. C’est cela notre métier. C’est comme cela que nous avons pensé à la gestion des stocks de matières premières dans les ambulances, dans un souci de raccourcir les délais de mise en place. Nous travaillons, de même, en gestion de parc optimisé, avec géolocalisation pour une meilleur organisation et une plus grande capacité d’intervention. Dans le BTP, nous avons mis au point un système de localisation des outils dans le véhicule. Dès que le véhicule part, le chauffeur sait qu’il a oublié un outil et où il l’a laissé. Au prix des outils spéciaux qu’ils utilisent – et dont beaucoup sont perdus, publiés, volés car laissés sur un site trop longtemps, la solution connectée s’avère primordiale pour l’entreprise et rassurante pour l’équipe ! On a trouvé des solutions également de chargement pour que cela soit le plus court possible etc. Ces solutions connectées nous permettent, en outre, de conquérir de nouveaux clients et d’en fidéliser d’autres !

Autant de solutions doivent agrandir mécaniquement votre portefeuille clients ?

Certainement mais il faut plutôt dire que nous apportons toujours plus de service à notre clientèle et lui amenons des plus-values qu’elles n’auront pas ailleurs. Je citerais un autre exemple, avec les loueurs par exemples. Nous avons élaboré un programme qui permet aux conducteurs de véhicules hauts d’éviter les ponts. Les assureurs nous en sont reconnaissants ! Bien sûr, nous optimisons les trajets, ce qui diminue les risques (coûts d’assurance en moins) et les distances (réduction des dépenses de fonctionnement), le tout facilitant la constitution de flottes de véhicules électriques, etc. Ce qu’il faut retenir, c’est que nous mettons des applications simples d’utilisation, au service d’un produit, et des applications simples pour l’usager de tel ou tel véhicule. C’est cela qui s’avère capital, faciliter la vie de l’usager. Je dois ajouter qu’à Laval, où nous avons notre principal centre de recherche et développement, nous disposons aussi d’une spécificité locale : Laval, en effet, est la capitale française de la réalité virtuelle, depuis 1998. Nous sommes associés à ce développement hors du commun, ce qui nous permet de présenter à des constructeurs automobiles, des véhicules en réalité virtuelle et d’apporter des améliorations à la conception, en direct, devant le client. C’est un vrai plus que nous offrons ainsi à notre clientèle.

Propos recueillis par Hervé Daigueperce

Hervé Daigueperce
Hervé Daiguepercehttps://www.algerie-rechange.com
Rédacteur en chef d'Algérie Rechange, de Rechange Maroc, de Tunisie Rechange et de Rechange Maghreb.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

spot_img
spot_img
spot_img

Articles similaires
Related

BYD : le rêve devenu réalité

Encore assez méconnu en Afrique du Nord, le constructeur...

MOTRIO célèbre ses représentants !

Lors du dernier Equip Auto Alger, Idris Saci, le...

Nexus Connecting Days, Maghreb 2023

Reprenant l’accroche de Nexus International, à savoir « Un...

Eurorepar prépare l’arrivée de Distrigo

PSA ou plutôt Stellantis poursuit sa conquête de l’après-vente...