Venu admirer et encourager les entreprises du secteur de l’industrie automobile, Mehdi Jomaa, tout à la fois ingénieur et homme politique d’envergure, a accepté de répondre à nos questions, à l’occasion de sa visite de Tunisia Automotive.
Que pensez-vous de cette initiative, de créer un salon, Tunisia Automotive, qui promeut les industries et le savoir-faire de la Tunisie ?
C’est une excellente initiative, et justifiée parce que nous disposons d’un réel tissu industriel dans l’industrie automobile, et d’un savoir-faire qui ne sont, malheureusement pas, suffisamment connus ni valorisés. Un salon doit effectivement remplir ce rôle également. Je suis cette industrie depuis plusieurs années et j’en observe l’avancée, une avancée notable, bien que je pense que ce ne soit pas suffisant au regard de notre réel potentiel, de ce que nous pouvons faire, de notre savoir-faire historique dans l’industrie automobile.
Quels atouts mettriez-vous en avant pour inciter des investisseurs potentiels internationaux, soit à venir soutenir les industries déjà importantes ici en Tunisie, soit à créer des industries comme la construction d’automobiles ou la fabrication de pièces ?
Mon origine industrielle me permet d’affirmer qu’il est illusoire de croire qu’on acquiert un savoir-faire dans le milieu de l’industrie par un simple transfert simple d’outils, d’équipements ou même de techniciens et d’ingénieurs. Or, la Tunisie dispose, déjà, d’un socle de savoir-faire extraordinaires, d’une tradition industrielle, qui remontent à plusieurs décennies, et qui constituent sa force première. Ceci établi, on retrouve des atouts bien connus, à commencer par un tissu, une filière qui s’est bien développé, or nous savons combien il est important pour l’industrie automobile de développer un réseau de sous-traitance. Parallèlement, nous pouvons compter également sur une logistique favorisée par sa proximité avec l’Europe, sans oublier – et c’est essentiel – toutes ces écoles qui sont en train de fournir des techniciens, des cadres, des marketer, des acheteurs, toutes les fonctions nécessaires au déploiement de l’industrie automobile. Je voudrais ajouter que de très nombreux tunisiens travaillent dans les industries automobiles partout dans le monde, et je pense que c’est un réservoir pour un développement majeur et l’exploitation de l’ensemble des potentiels dont nous disposons.
Pensez-vous que la Tunisie a toute sa place dans la course vers l’Afrique et le développement du secteur industriel ? Le Maroc s’est déjà positionné avec ses écosystèmes, Tanger Med, La Tunisie peut-elle attirer des investisseurs dans une perspective de croissance en Afrique ?
Le Maroc n’est pas un concurrent. Nous évoluons, en effet, dans une position de pont entre un nord qui prospère, qui dispose de la technologie, du savoir-faire et d’un sud qui se développe avec un potentiel énorme. Nous pouvons donc compter sur un grand volume de business pour l’ensemble des pays du nord, quel que soit le pays. C’est toute la région qui doit se développer de manière cohérente et ce qui se fait au Maroc ne peut que nous encourager, si nous nous plaçons dans une projection à 10, voire à 20 ans. Les opportunités sont énormes pour nous, et si nous souhaitons beaucoup de bien pour le Maroc, il faut quand même rappeler que nous avons nos propres atouts et peu de réels compétiteurs dans la région, bien des aspects.
Propos recueillis par Hervé Daigueperce
