On les appelle des emballeurs…

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Si, pour les personnes, la première impression est capitale dans une rencontre, il en est de même pour un packaging, mêmes couleurs ou logos, même apparence et le tour est joué… C’est la première forme de contrefaçon !

Pour nombre de professionnels qui luttent contre la contrefaçon, une expression revient sans cesse, « eux, ce sont des emballeurs » pour définir ceux qui trafiquent, quel que soit le trafic, d’ailleurs. Parce que le client – professionnel ou consommateur final – va d’abord se fier à une marque, identifiable, normalement, par son emballage. Pour illustrer ce propos, il suffit de voir ce qui se vend principalement sur Internet en pièces de rechange. Ce ne sont pas des marques inconnues mais bien des ghostbusters internationaux, parce qu’on sait (ou on croit savoir – ce qu’on achète. L’image est donc capitale comme le souligne Farid Sihocine (KYB) : « La forme que prend la contrefaçon se résume en un mot IMITATION, car pour des consommateurs non avertis, un « i » ou un « l » sur un emballage n’est pas forcément un indice parlant ». Une réflexion qui fait écho aux autres commentaires, ainsi, Maryline Merlier (NGK) ne laisse planer aucun doute : « La contrefaçon se joue sur le packaging, qui est quasi identique au modèle d’origine mais également au niveau du produit lui-même qui, pour les non-avertis et sur des pièces très techniques, est quasiment imperceptible. On va donc avoir visuellement un produit identique, mais qui va différer sur les finitions dans le détail et surtout, sur les matériaux utilisés et c’est là qu’il y a des risques sur le montage et sur le fonctionnement. » Tandis qu’Arnaud de Patoul enfonce le clou : « En plus du produit contrefait se trouvant dans l’emballage qui est totalement en dessous des normes de qualités Aisin (et très souvent dangereux pour l’utilisateur) ce sont principalement nos boîtes qui sont contrefaites. Dans la majorité des cas, le design des boites est très similaire et la couleur bleue reconnaissable des boîtes Aisin est également « copiée » De manière générale, un nouveau nom très proche à Aisin sera inventé, par exemple Asian, Iasin, Nisian… ces personnes pouvant être très créatives. Dans d’autres cas de figure, les produits contrefaits sont vendus dans des boîtes presque identiques à celle des boîtes originales Aisin. »

Avant d’ouvrir la boîte…

Comme on l’a vu, l’emballage constitue la première étape de la contrefaçon visuelle, à telle enseigne qu’on pourrait aussi se pencher sur le rôle des imprimeries et cartonnages sollicités pour réaliser les emballages, sans validation des fabricants… Être victime d’une supercherie est une chose, fermer les yeux en est une autre… Hocine Kebir (Bilstein), sans mettre en cause qui que ce soit, constate : « La fabrication d’emballages en local constitue la principale forme de contrefaçon actuellement dans le marché, à commencer par les produits qui semblent faciles à fabriquer pour ces gens-là, comme les antigels, mais aussi les liquides de frein (ce qui constitue un vrai danger pour tout le monde). Il est impératif que certains détaillants et ateliers de réparation en prennent conscience, et évitent de commercialiser ce genre de produits, en s’approvisionnant auprès de sources fiables, en d’autres termes, chez les professionnels de la pièce de rechange en Algérie. » En clair, l’une des parades contre la contrefaçon pour le consommateur ou le petit détaillant consisterait à s’approvisionner chez les distributeurs et revendeurs officiels. Certes, ce n’est pas toujours aisé, les marques faisant évoluer leur réseau de distribution, mais se renseigner est toujours possible et les acteurs reconnus bien identifiés. D’ailleurs, quelques signaux sont possibles à détecter ainsi que nous l’explique Richard Soriano, Directeur Aftermarket de Brembo, France, Belgique et Maghreb : « Un bon indicateur des contrefaçons est également le prix : si le prix proposé est nettement inférieur à 15 % du prix de marché habituel, le produit doit être considéré avec prudence. Des remises exceptionnelles de 50 % ou plus ne peuvent pas avoir lieu sur des produits authentiques Brembo. De plus, les composants hautes performances ne sont disponibles qu’en kit. Les étriers de frein simples, par exemple, ne font pas partie du portefeuille de produits Brembo. »

Appeler à la prise de conscience

Cependant, si les équipementiers se protègent de plus en plus, les escrocs évoluent également, la mondialisation et internet les aidant bien… C’est ainsi, remarque Benoît Péalat (ZF) que « les contrefacteurs ne recherchent pas à couvrir une gamme, bien au contraire, ils choisissent une marque, une trentaine de références parmi les fast movers et inondent le marché, avant de changer de marque ou de références, quand les premiers ont bien « donné ». Ce qui s’avère plus ennuyeux, c’est qu’ils se sont « professionnalisés » et qu’ils ne sont plus aussi facilement détectables qu’à leurs débuts où l’emballage était mal fait, le produit pas très ressemblant et le prix tellement bas qu’ils signaient leur escroquerie. Aujourd’hui, ils vendent à 80 ou à 90 quand le produit est sur le marché à 100, de manière à faire croire à une bonne affaire, et leurs produits sont de plus en plus identiques aux originaux et dans des emballages soignés. Le temps où l’emballage était cousu d’erreurs visibles au premier regard est bien révolu. Si les performances du produit sont toujours mauvaises voire dangereuse, l’aspect visuel est bien mieux travaillé, voire très ressemblant ». Comme le commente Khalil Akhoun (Lumileds) « Ils traduisent dans la langue locale, ils customisent au point que les gens se font avoir. Les produits viennent de la Chine mais peuvent arriver par le Moyen Orient, leur imagination est sans bornes. Et cela peut prendre différentes formes, comme de mettre des pièces d’équipementiers OE dans des boîtes constructeurs. On en revient à ce qui se passe pour les montres ou le textile (maillots de foot par exemple), il existe différentes catégories, différentes qualités pour des consommateurs plus ou moins regardants. Il faut en appeler à la prise de conscience des acteurs professionnels et à leur volonté d’éradiquer le problème ou, à tout le moins, à en diminuer les conséquences ». C’est pourquoi, nombre de responsables institutionnels en appellent à la prise de conscience collective des dangers que cela représente pour la population, une prise de position qui pourrait passer par la sécurité routière et une forme de pédagogie. D’aucuns allant même jusqu’à évoquer des responsabilités au niveau de la religion, ou comment concilier respect de la foi et responsabilité d’un accident mortel pour avoir vendu, en pleine, conscience, des produits contrefaits dangereux. 

Hervé Daigueperce
Hervé Daiguepercehttps://www.algerie-rechange.com
Rédacteur en chef d'Algérie Rechange, de Rechange Maroc, de Tunisie Rechange et de Rechange Maghreb.

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